En quittant l’île Rouge, il était encore assez tôt et la possibilité s’offrait à nous de se rendre dans le secteur de l’île Verte, à environ 9 km de là.
À ce moment, la marée était à son plus bas. Par définition, il est assez périlleux d’être près d’un phare en bateau quand la marée est basse. C’est justement pour avertir d’un danger qu’un phare est construit à un endroit précis. En s’éloignant tranquillement du rivage, on voyait apparaître des rochers inquiétants qui n’étaient pas là à notre arrivée. C’est très lentement qu’a navigué à vue Marc Loiselle, le pilote du Zodiac, en regardant le moindre indice qui pourrait indiquer la présence d’un récif. Se déplacer lentement nous a aussi permis d’apercevoir des phoques communs, curieux, sortir leur tête de l’eau pour nous observer. Après avoir fait le tour complet du haut fond au nord de l’île, nous avons fait direction vers l’ouest pour contourner l’île et pour éventuellement prendre la direction sud. Mais les vagues et le fort vent ont eu raison de notre détermination. Sans être dangereux, ça aurait été trop long de naviguer dans ces conditions. L’île Verte, ce sera pour une prochaine fois…
Changement de cap, direction nord vers le phare du Haut-fond Prince.
Le retour m’a permis d’apprendre quelque chose d’intéressant sur la navigation : les fortes vagues qu’on avait rencontrées à l’allée, avec le vent de face, nous ont paru beaucoup plus calmes au retour, avec le vent dans le dos. C’est que, au lieu d’avoir à monter et descendre chacune des vagues, il était possible en allant à la bonne vitesse de surfer sur la vague. Les remous qui ont tant cognés se sont donc traversés beaucoup plus rapidement et sans qu’on se fasse trop brasser.
À l’approche du phare du Haut-fond Prince, le soleil m’a fait un beau cadeau en créant une ligne lumineuse parfaite pour une photo en silhouette. Catherine et moi étions aux anges à la vue de cette structure si mystérieuse, si isolée.
C’est le plus récent des phares du Saint-Laurent. Le pilier-phare a été construit en 1961 et est surnommé la Toupie par les gens du coin, à cause de la forme conique de sa base. En incluant la tour, la structure mesure 25 m. C’était une merveille de technologie à l’époque.
L’histoire de Noël 1966 me revient en tête, alors que les trois gardiens du phare sont pris dans une tempête. Les vagues de plus de 12 mètres atteignent l’étage principal du phare qui est balayé à répétition par l’eau glacée. Les pauvres hommes doivent se réfugier dans la tour. Craignant que le pilier au complet soit emporté, ils lancent un S.O.S. Ce n’est que 36 heures plus tard qu’ils seront sauvés par la garde-côtière.
Marc nous a fait faire quelques tours pour me donner différents angles de prise de vue. Pendant qu’on prenait des photos, il nous fait une surprise : en composant un code sur une fréquence radio précise, il fait déclencher le criard de brume : « Ça, c’est juste pour toi mon Pat! ». Contrairement à ce qu’on imagine d’une corne de brume, le son du criard était plutôt aigu et il ne paraissait pas très fort quand on était près. Mais en s’éloignant, je me suis rendu compte que c’est le genre de son qui porte assez loin.
Voici quelques photos du phare du Haut-fond Prince…
En revenant vers Baie-Sainte-Catherine, nous avons pris le temps d’observer quelques rorquals. Ça terminait bien notre première journée du périple. Demain, les phares du Cap de la Tête au Chien et du Cap-au-Saumon.